mardi 24 mars 2015

La rémunération sur objectifs : mode d’emploi

La rémunération sur objectifs : mode d’emploi

lemonde.fr | 13 Mars 2015

Comment fixer une prime d’objectif ? L’employeur peut-il en modifier unilatéralement les modalités d’application ? De plus en plus d’entreprises ont recours à la rémunération variable. Ce système agit comme un élément de motivation supplémentaire à l’égard des salariés, en les incitant à augmenter leur performance, tout en réservant à l’employeur une certaine flexibilité dans la fixation de la rémunération.
C’est ainsi que les primes sur objectifs ont progressivement gagné du terrain. À la différence des commissions, elles ne répondent pas à l’évolution du chiffre d’affaires mais à la performance des salariés. Pour autant, leur mise en place doit répondre aux conditions fixées par la jurisprudence.

Dans un important arrêt de principe, rendu le 22 mai 2001, la Cour de cassation a énoncé, avec force, que « les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction » (Cass. soc. 22 mai 2001, n°99-41.838). Pour autant, cette décision ne fait pas obstacle à une fixation des objectifs par voie contractuelle.
Les objectifs fixés aux salariés, qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs, doivent répondre à une exigence de précision et se prêter à vérifications. Il est impératif qu’ils soient réalistes et réalisables, compte tenu de la situation économique du secteur professionnel dans lequel évolue le salarié, de ses compétences et des moyens mis à sa disposition.

Des normes compatibles avec le marché

En d’autres termes, il faut être attentif à ce que les objectifs fixés correspondent à des normes raisonnables compatibles avec le marché.
Les objectifs doivent être précis, déterminés par une documentation en langue française et ne doivent pas être susceptibles de dépendre uniquement de la volonté patronale. C’est pour cette raison que l’employeur doit toujours être en mesure de fournir les éléments qui lui servent de base pour déterminer le niveau d’atteinte des objectifs.
Enfin, la fixation d’une prime sur objectifs ne saurait avoir pour effet de porter le salaire en deçà des minima légaux ou conventionnels.
À défaut de fixation des objectifs par l’employeur, le salarié pourrait prendre acte de la rupture de son contrat de travail, pour autant que le manquement considéré en rende la poursuite impossible. Cependant, la Cour de cassation l’apprécie aujourd’hui de façon plus stricte (Cass. soc. 12 juin 2014, n°13-11.448 et n°12-29.063).

Quelle révision unilatérale ?

Par ailleurs, lorsque la part variable dépend d’objectifs fixés unilatéralement, faute pour l’employeur d’avoir précisé au salarié les objectifs à réaliser ainsi que les conditions de calcul vérifiables, et en l’absence de période de référence dans le contrat de travail, la rémunération devra être payée intégralement (Cass. soc. 10 juillet 2013, n°12-17.921).
La Haute juridiction considère que lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, ce dernier peut « les modifier dès lors qu’ils sont réalisables et qu’ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d’exercice » (Cass. soc. 2 mars 2011, n°08-44.977).

En revanche, lorsque les objectifs ont été fixés par voie contractuelle, l’employeur perd alors toute faculté de révision unilatérale et doit engager une négociation en considération de la périodicité prévue au contrat. A défaut d’accord, c’est au juge qu’il reviendra de déterminer le montant de la rémunération variable au regard des critères retenus et des accords conclus les années précédentes.

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